La porte d'une sucursalle du Temple du Bannin s'ouvrit, doucement. La lumière pénétra en masse dans le petit endroit, plus autel qu'autre chose. Luminosité s'estompa soudain lorsqu'une ombre passa le seuil de la porte. Une ombre? Non, un homme. Un homme qui avait quelque chose de familier, tout de même, même s'il semblait avoir grandi, ses traits étaient plus prononcés. Une peu plus d'une année avait passé, mais Warumo semblait en avoir prit le double.
Il était là, au seuil de la porte, immobile. Ses cheveux, noirs, autrefois déjà longs et en chignon, avaient incroyablement poussés, lui tombant jusqu'à la moitié du dos. Ils étaient sales, en bataille. De plus, détachés, ils semblaient être une masse informe qui lui salissait la moitié du visage. Un visage également terreux. Il avait même une courte barbe mal taillée, qui semblait grouiller de bestiaux.
Ses vêtements n'avaient rien à envier à la tête. Il portait un kimono noir, sur lequel on pouvait tout de même voir les tâches de boue, et de sang? À quelques endroits, épars, gisait lamentablement un morceau d'armure : une épaulière qui pendouillait, une demi-cuirasse sur sa poitrine, portant encore le sceau, délavé à demi-effacé, du Bannin. Malgré le beau temps, il goutait, laissant une quantité d'eau impressionante sur le sol, comme s'il venait de se prendre l'averse du siècle. Seul son sabre et le fourreau semblaient avoir eut un entretient décent.
Face à lui, le Shogun. Ne demandez pas comment Warumo savait qu'il était là, il le savait, c'est tout. Et il était venu. Lorsqu'il le vit, le piteux Tokurei se jeta à se pieds, non pas comme le traître qui implore mais comme le croyant qui prie. Il avait le front contre le sol, et tenait fermement les jambes du Shogun.
Il ouvrit la bouche, sa voix était mal assurée et changeait de fréquence, comme si elle avait été peu utilisée ces dernières années.
_ Sho...Shogun c'est...incroyable! Je...je refuse votre pardon, mais je vous présente mes excuses. Je...j'ai fuit lors de votre départ, je ne vous ai pas suivit. Quel déshoneur. Et lorsque, plus tard, j'ai voulu me donner la mort, la Mort elle-même m'a refusée, tellement mon déshoneur était grand. La cicatrice du seppuku, maintenant, chaque jour, me rapelle mes erreurs. Alors j'aurai dû vous chercher, dû vous retrouver avec plus de hargne et de hardiesse. J'aurais dû prêcher sur tous les mondes vos messages et votre instruction. J'aurai dû me hâter ici dès que j'ai eu vent de la rumeur de votre retour. Mais je n'ai rien fait. Je me suis cherché, je ne me suis pas trouvé. Je me suis isolé, mais n'ai pas médité. Vos enseignements, je les ai perdus. J'ai sombré, vil que je suis, dans la dépression et l'enfermement, aux antipodes de tout ce que vous m'aviez appris. Je n'ai trouvé ni paix, ni calme, ni sérénité. Et vous voir, aujourd'hui, quel joie...Et pourtant je suis si peu méritant d'une telle vision. Je n'ai plus d'hommes, plus de bâtiments, plus d'habitats. En une année, j'ai régressé de dix ans. Shogun, je ne veux votre pardon, juste votre autorité. Un mot de vous, et je m'en vais.